Dans ma REPpublique à moi, on entend les bruits de dehors. On entend aussi les bruits des autres REPpubliques. Ils ressemblent aux notres, souvent. Certains n’en sont même que les échos.
Je ne le connais pas, Jean. Je ne sais rien de son histoire. Presque rien des détails qui l’ont amené si loin. Mais je le comprends. Je crois même que je peux ressentir assez exactement ce qu’il a ressenti, ce jour là, et les jours qui ont suivi.
Hier, quelques heures à peine avant que je lise ce qui était arrivé à Jean Willot, E. a décidé de descendre les escaliers sur les fesses, pour aller en récréation. Il était à l’arrière du groupe, alors on ne l’a pas vu tout de suite. C’est quand Y. a trébuché sur lui et a failli taper la tête sur les marches qu’on a réalisé.
Mon collègue a demandé des explications à E. qui ne lui en a évidemment pas données. Le maître a haussé un peu le ton. Toujours rien. Un peu plus fort. Il a exigé de E. qu’il présente des excuses à Y. E. a beaucoup pleuré. Il a fini par s’excuser.
Et après ? Et quand E. est rentré chez lui ? Qu’a t-il raconté à ses parents ?Comment Maman a t-elle entendu les pleurs que son enfant lui a racontés ?Comment Papa a t-il compris la colère du maître que E. a décrite ?
Les parents de E. ont entendu, compris et approuvé. Les parents de E. ont expliqué, eux aussi, à leur fils qu’il devait se comporter autrement, penser aux autres, ne pas se mettre en danger, ne pas blesser ses camarades.
Et le fleuve de ma REPpublique a continué à couler – presque – tranquillement.
Cela n’a pas été le cas pour lui. Pour cet enseignant, là-bas. Son fleuve a cessé de couler. Un immense barrage s’est dressé. Qu’il n’a pas réussi à surmonter . Il a préféré abandonner le navire, ou plutôt le radeau sur lequel il avait vogué déjà tant d’années.
Je ne sais pas exactement ce que son E. à lui avait fait. On me parle ici aussi d’escaliers. Le hasard n’en est pas un. On me parle ici aussi de voix levée . Ici encore de bras tiré. Le mot violence est prononcé. Intolérable, évidemment, inacceptable, si elle a existé.
Je ne vois nulle part le mot dialogue.
Je ne vois plus le mot confiance.
Ce petit mot que certains aiment tellement utiliser, nous concernant. Parce que c’est bien de ça dont il s’agit. L’école de la confiance, oui. Du dialogue. Du respect.
Entre nous tous.
Soutien à la famille de Jean Willot, à ses collègues et à ses élèves.
Anouk F.
Juste pour Jean …
@t… alain
Tristesse infinie!
Merci Anouk. Je voudrais faire la lumière sur quelques zones d’ombre. Jean a décrit ce qu’il s’est passé avec son élève. Il déclare qu’il n’y a pas eu de contact physique au moment ou il l’a puni. L’élève pendant le temps de classe précédent la récréation était extrêmement dissipé, tapait avec son stylo sur la table et n’arrêtait pas de parler avec son voisin. Jean leur a demandé plusieurs de se calmer et de ne pas perturber la classe. Avant de sortir en récréation il leur a dit qu’ils seraient punis.
IIl leur a demandé de s’asseoir sur les marchés de la cour en début de recreation ce qui est pratique habituelle dans cette école. Il n’a aucun témoignage de violence de Jean envers cet élève (ni envers aucun autre d’ailleurs)
la punition et ce qui l’a justifié, rapporté par la presse, est différente, sans précision d’aucune source tangible. Ma question c’est : comment et pourquoi la presse, un article du parisien au départ, repris en boucle et jamais vérifié, continue à diffuser ce fake qui instille le doute. j’ai relevé d’autres erreurs, et zones d’ombres mais que tu n’a pas repris. Je me tiens à la disposition de chacun pour en parler.
Bruno Martin, instit dans la Nièvre et ami de Jean et de sa famille.
Merci pour ces précisions, Bruno. Comme je l’écris dans la chronique, je n’avais pas, au moment où j’écrivais ces lignes, le détail précis des évènements. Je te remercie de les préciser ici.
C’est une histoire qui pourrait être la nôtre malheureusement… Comme tu l’indiques si bien, sans prendre aucun parti, le problème est bien la confiance. Sans confiance, notre métier n’a pas de raison d’être. Cette relation parents-enseignants, que l’institution appelle « coéducation » et que pour ma part j’appelle « coopération » ou encore « partenariat », est fondamentale pour la réussite de l’élève, pour l’évolution de l’enfant. Merci à toi pour cet article et cet hommage.
Marine