Encore. Beaucoup. Toujours.

Saute cinq carreaux. Pas quatre. Pas trois. Cinq.
Écris en bleu.
Souligne en rouge.
Corrige en vert.
Remonte ton masque.
Lave toi les mains. Encore une fois.

Et n’aies pas peur, surtout. Ne te laisse pas impressionner par tous ces policiers, devant le portail. Oublie le nombre de morts que tu as entendu sans le vouloir à la télé hier soir, à la radio, ce matin. Souviens toi de Mamie, ferme les yeux et souviens toi fort. Envoie lui tous les baisers que tu n’as plus le droit de lui donner.

Apprends. Apprends encore. Apprends beaucoup. Apprends toujours.
Ouvre tes yeux. Fais les briller.
Laisse ton sourire exister, même sous ton masque. Fais le remonter bien haut, voilà, comme ça.
Étends tes bras, rappelle toi comment tu les refermais autour des épaules de tes copains, autour des genoux de ta maîtresse.
Cours, ris, vole.
Joue. Joue encore. Joue beaucoup. Joue toujours.
Échange, écoute, parle, dis ce que tu ressens.

Ne compte plus le nombre de carreaux.
Écris en vert.
Souligne en rose.
Corrige en jaune.
Ajoutes-y des paillettes, des étoiles, des fleurs.
Amuse-toi. Bien sûr. Amuse-toi encore. Amuse-toi beaucoup. Amuse-toi toujours.

Avant tout le reste.

5 réflexions sur « Encore. Beaucoup. Toujours. »

  1. Bonsoir,
    Tu décris bien, en filigrane, l’inutilité de la punition, l’imbécilité de la coercition, le « pouvoir » des instits sur les petits qui sont en face d’eux. Imaginer la tête de mes collègues qui donnent des « lignes » si leur inspecteur-trice leur ordonnait de recopier cinq fois le même chapitre d’un livre de pédagogie, pour être certain qu’il (elle, ne soyons pas sexistes…) ait bien compris la bonne façon de faire.

    Oh, bien sûr qu’il en faut des normes, qu’on ne peut pas penser que tout se met en place sans un minimum de rigueur… Mais cette rigueur, outre qu’elle ne doit jamais empêcher la rêverie, ne peut-elle pas, plutôt que de la punition, venir des rituels ? Là encore, les rituels sont faits pour être bousculés, ils doivent être évolutifs.

    On doit jouer en classe. On doit jouer avec des jeux (de société, inventés, construits…), mais on peut jouer aussi avec des chiffres, avec des nombres, avec des lettres, avec des mots. La classe doit être un espace de jeux ritualisés, et ils prennent tout leur sens. Le jeu est infiniment plus efficace pour l’enfant que la punition pour l’élève. Instaurer un cadre qui permet de jouer, d’avoir le sentiment de jouer tout le temps… Il y a peut-être là une clé d’enseignement.

    Ces lignes que tu montres dans l’illustration me sont largement insupportables. Quant à leur contenu, il est tout à fait anti pédagogique.

    Cordialement,

    Frédéric.

  2. Il est certain que parla force des choses, notre finalité dans la société a intrinsèquement changé à cause du virus : maintenant on nous demande implicitement de « garder » les enfants, et nous en arrivons à penser à des activités récréatives de garderie….il va falloir résister.

  3. Merci pour ce texte , léger et puissant en même temps .
    Merci pour les enfants que vous accompagnez . Vous les aidez à surmonter les souffrances de notre époque si particulière . Vous leur ouvrez les portes qui semblent se refermer . Vous leur laissez la possibilité de conserver liberté et fantaisie tout en avançant .
    Je pense aux générations anciennes qui ont affronté la guerre, les privations, les deuils, la peur … je pense à mon institutrice d’ecole Primaire qui a vu , lorsqu’elle avait 20ans, en 40,pour sa première nomination, une de ses petites élèves se faire faucher par les balles en sortant de l’école …
    Nous approchons de la barbarie aujourd’hui. Tout ce que vous faites pour permettre aux enfants de vivre leur enfance envers et contre tout , est bienfaisant et salvateur . Merci et bravo .

  4. Merci pour ce nouveau texte, touchant et si juste comme toujours. Je ne suis pas encore enseignante, mais je l’ai imprimé et affiché dans mon bureau pour ne jamais oublier l’essentiel. MERCI !

  5. Bonsoir Anouk… Ne cherche pas le rapport de ce commentaire avec Encore. Beaucoup. Toujours…
    Il n’y en a pas… Sauf que c’est après avoir lu ton post que j’ai découvert un livre que je ne connaissais pas… Non, pas « Dans la rue de l’école » mais un livre sur le Handicap… « Le petit livre des HANDICAPS »
    Et je l’ai commandé directement à l’éditeur qui est aussi auteur du livre…et je lui ai même demandé un autographe…
    Et puis…

    Mais non, j’ai l’autorisation de Georges Grard, c’est son nom, de publier ça et là des extraits du livre… Alors je voudrais te dédier le premier car je suis sûr que Georges serait d’accord…

    Les deux cruches

    « Il était une fois, il n’y a pas si longtemps de cela… Une vieille dame qui prenait deux cruches vides qu’elle attachait aux extrémités d’un long bâton, se rendait chaque matin à un puits pour son eau quotidienne. Une fois les cruches solidement fixées, elle soulevait le bâton au dessus de sa tête et l’installait sur ses épaules. Puis, elle sortait de sa maison et parcourait deux kilomètres pour atteindre le puits. Là, elle remplissait ses deux cruches d’une eau pure. Une fois l’opération effectuée, elle reprenait le chemin du retour lourdement chargée.
    Un jour d’automne, une des cruches heurta le muret du puits et se fissura. La vieille dame n’y fit pas attention et poursuivit sa tâche. La cruche ainsi ébréchée abandonnait une partie de son contenu sur le sentier du retour.
    Mais la vieille dame ne changea en rien ses habitudes. Chaque jour, qu’il fasse un soleil éclatant, qu’il vente ou qu’il neige, elle transportait les deux cruches vides à l’aller et, pleine pour l’une et à demi-pleine pour l’autre, au retour. Elle le fit ainsi durant des mois…
    Seulement , la cruche fêlée se sentait tellement coupable de ne pas satisfaire la vieille dame qu’un soir, elle s’adressa à elle :
    – Je suis vraiment désolée et triste de ne pas rapporter autant d’eau que je devrais, lui dit-elle.
    La vieille dame lui sourit et répondit :
    – Ne sois ni triste, ni désolée regarde donc les fleurs qu’il y a sur ton côté du chemin… J’ai semé des graines et tu les a arrosées chaque jour. Quand, à table, je bois l’eau du puits, as-tu remarqué qu’il y a toujours devant moi un bouquet de fleurs ? C’est grâce à toi que la maison est belle et accueillante, et je t’en remercie. »

    Ce petit conte pour exprimer que même fêlé, brisé, abimé, blessé, amputé ou « cassé » chacun d’entre nous peut être source de beauté, de joie et de VIE !

    Voilà Anouk… Où dois-je m’adresser pour commander « Dans la rue de l’école » avec une dédicace 😉 ?

    @t…. alain l.

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