(Photo : Christian Capron)
Elle a dit: “Je vous fais confiance, à vous, dites – moi”.
J’ai répondu: “Je vous remercie pour ça, mais je ne peux pas décider à votre place.”
Alors elle a ajouté: “Je ne sais pas quoi faire, est-ce qu’il y a un risque, est-ce qu’il va attraper le virus si je le renvoie à l’école, est-ce que son père asthmatique risque de l’attraper à son tour ensuite, est-ce qu’il va faire attention, est-ce que vous, vous allez l’attraper aussi?”
J’ai laissé ses questions tourner en boucle dans ma tête avec toutes celles que je me posais déjà.
Je l’ai écoutée.
J’ai attendu.
Et puis j’ai répété: “Je ne sais pas, c’est à vous de prendre cette décision. Quelle qu’elle soit, je vous accompagnerai”.
Il y en a eu d’autres comme elle, au téléphone ce matin, ou sur ma boite mail.
Des questions, beaucoup de questions.
Des “je ne sais pas”, des “peut-être” et des “on a peur”.
Moi aussi, j’ai peur.
De ne pas réussir à les empêcher de se toucher, de s’approcher.
D’oublier de me laver mes mains chaque fois que j’attraperai le crayon de l’un pour l’aider à former ses lettres.
D’oublier de laver celles de M. lorsque sa maladie le fera de nouveau baver.
De ne pas savoir donner l’alerte si un autre a l’air de se mettre à tousser.
De ne pas pouvoir en serrer une autre dans mes bras quand elle se sera blessée dans la cour de récré.
D’être responsable d’avoir laissé le virus passer et qu’ils le ramènent avec eux, chez eux.
Je n’ai pas la bonne armure.
Mes épaules ne sont peut-être pas assez larges pour tout ça.
J’ai peur aussi de ne pas les revoir.
J’aurais l’impression de les avoir abandonnés.
J’ai déjà un peu le sentiment de les oublier.
Ils ont besoin de l’école, des autres, et de nous.
Il faut qu’on se retrouve, qu’on recommence, qu’on avance, qu’ils progressent.
Qu’ils apprennent.
Encore.
Toujours.
Ce matin, mon fils m’a dit “Maman, ils me manquent vraiment, mes copains.”
J’ai répondu “A moi aussi, ils me manquent, tes copains”.
Alors il a ajouté “Je suis content d’y retourner, on pourra jouer à s’attraper et puis à la cantine, c’est sur, on va bien rigoler.”
J’ai laissé ses phrases et son sourire se dérouler, je l’ai laissé rêver que tout reviendrait exactement à la place à laquelle on l’a laissé.
Je n’aurais peut-être pas dû.
Je ne sais pas.
» J’ai laissé ses phrases et son sourire se dérouler, je l’ai laissé rêver que tout reviendrait exactement à la place à laquelle on l’a laissé.
Je n’aurais peut-être pas dû. »
Bien sûr Anouk … Bien sûr …
Tu l’as juste laissé encore un peu croire au Père Noël …
Sauf que cette fois, nous aussi, et même si on sait qu’il n’existe pas, qu’il n’a jamais existé et qu’il n’existera jamais il n’y a pas d’autre solution que d’essayer d’y croire quand même encore un petit peu avec lui…
Qui pourrait expliquer à son enfant que nous avons peut-être tous et toutes scié la branche sur laquelle nous étions assis…
Ne doute pas de ton armure Anouk !!! Ne doute pas …
@t… alain
Peut-être quee ce métier d’enseignant, toujours perçu comme un métier essentiellement maternel, tourné vers l’humain, va devoir évoluer vers une autre approche plus technique, redonnant comme vous le faites aux parents la responsabilité de l’éducation de leurs enfants. Ce ne sont pas les vôtres, finalement, et cela vous enlèvera un gros poids de ne faire que enseigner,et une valeur supplémentaire face à l’administration pour obtenir unsalaire décent comme dans les pays scandinaves…bon courage en toout cas….
Bonjour,
Merci pour vos partages…
J’ai lu un article ce matin, qui m’a redonné un peu de confiance… Même si ça ne change pas les précautions à prendre, il tempère les informations qu’on a pu avoir au début de l’épidémie. Cela permet de relativiser (un peu)…
Je vous copie-colle le lien, si vous souhaitez le lire :
https://www.quechoisir.org/actualite-covid-19-les-enfants-sont-ils-si-contagieux-n78959/?utm_medium=email&utm_source=nlh&utm_campaign=nlh200429
tellement ça …j’ai appelé mes parents d’élèves hier aussi .
ce matin en me levant un joli arc-en-ciel …gardons espoir
Bonne reprise
Merci pour vos mots toujours tellement bien choisis.